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Il faut que j’avoue. Je suis atteinte du syndrome de la performance aiguë

Publié le 8 novembre 2017

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Écrit par Pricile De Lacroix

D’aussi loin que je me souvienne, je crois que j’ai toujours dis que je ne pourrais pas être mère à la maison. Je pensais que c’était surtout parce que je n’avais juste pas assez la « fibre maternelle ». Déjà ado, j’étais la dernière de ma gang d’amies de l’église à aller voir les nouveaux petits bébés pour faire des gaga-gougou et des guili-guili-coucou avec la voix la plus ultra-haut-perchée possible. Je restais ben loin, en fait, en me moquant un peu d’elles secrètement. Ce que je me disais, c’est que j’aimerais assurément mes enfants de tout mon cœur le jour où j’en aurais, mais tsé, je rendrais un immense service à tout le monde, à eux comme à moi, de ne pas être chez nous 24h/24.

La vérité, je le réalise aujourd’hui, c’est que je ne trouvais pas ça assez sexy à mon goût, être mère à la maison. Je dis ça, mais j’admire sincèrement celles qui choisissent de le faire, et je sais qu’il y en a plusieurs qui ne le sont pas pour des raisons tout à fait valables. Mais pour moi, personnellement, ce n’était juste pas assez gratifiant sur le court terme, pas assez de défis et de possibilités d’avancement, et surtout, pas assez visible et valorisant à mon goût. J’avais pas tout à fait tord, le pire. Quand tu te retrouves trois fois par jour, après chaque repas, à quatre pattes sous la table à ramasser toute la bouffe collante que ta chère progéniture s’évertue à lancer au bout de ses bras juste pour voir ta réaction, tu N’ES PAS sexy, possiblement dans la position LA MOINS valorisante qui soit, et c’est très tentant de se demander pourquoi t’es pognée, toi, à faire ça tous les jours; quessssss ça donne de concret à l’humanité, honnêtement?!

La vérité, surtout, c’est que bien au-delà de ce qui me semblait être un simple « choix » de vie (c.-à-d. ne pas être mère à la maison), pas mal beaucoup de choses chez moi, en fait, étaient à propos de ça, vouloir PERFORMER et ÊTRE VUE.

 

J’me voyais pas aller

C’était subtile, quand même. Je l’écris comme si c’était super assumé, mais non. J’me voyais pas aller pantoute. Parce que je comprenais bien (en tout cas, en partie) le concept d’être sauvée par grâce, et de ne pas mériter, peu importe ce que l’on fait, l’amour juste complètement fou de Dieu. Sauf qu’une fois que ça c’est dit, j’avais tendance à penser qu’après, il fallait quand même tout faire pour être au top pour Lui plaire. La ligne peut être mince entre viser l’excellence pour Celui qui nous offre gratuitement la vie éternelle, et se mettre à compter sur ses propres forces pour en réaliser le plus possible. Ou comme Francis Chan l’écrit dans son livre Dieu oublié, j’avais basculé, en « commenc[ant] par vivre l’Évangile de grâce pour finalement croire en un système d’oeuvres » (p. 110). Vous savez, la parabole des talents, dans Matthieu 25, où les serviteurs reçoivent chacun un nombre de talents lorsque leur maître part en voyage? Moi, je me voyais comme celle qui avait reçu les cinq talents (je sais, c’est orgueilleux en titi), et qui devait absolument les faire fructifier au maximum pour plaire au maître et éviter d’être jetée, à la fin, «dans les ténèbres au dehors».

Alors tout dans ma vie reposait sur cette conception, et impliquait de faire le maximum pour performer, être à la hauteur des attentes que je pensais que Dieu voulait que j’atteigne, mais qui étaient clairement fixées en fonction des choses que JE valorisais et que MOI j’estimais valables. Et tant qu’à faire tout ça, autant que tout le monde le remarque et trouve ça cool. Mes choix d’emplois, d’implications à l’église, d’amies aussi, et de projets en tout genre, tout était clairement influencé par cette conviction. Même ma relation avec Dieu. J’essayais de passer plus de temps à lire ma Bible et à prier pour qu’Il me trouve assez spirituelle et me confie plus de responsabilités importantes et visibles. Comme si on pouvait «lui faire croire» ou l’impressionner!

Encore une fois, ce n’était pas vraiment conscient. Tellement pas, que j’étais la première à lire les passages bibliques sur les pharisiens et les trouver nono. «Faut-tu être pas subtile et orgueilleux pour aller prier au coin des rues et s’organiser pour que tout le monde voit que c’est toi qui mets le plus d’argent dans le tronc de l’arbre!? Pouahaha!» Ou l’histoire de Marthe et Marie (Luc 10). «Men! Jésus y’est chez toi, Marthe! Quessé tu fais dans ta cuisine à essayer de montrer que t’es la meilleure popoteuse de la région? T’es en train de tout rater!» Et pendant que je les jugeais, je ne voyais pas que mon coeur était dans le même état que les leur, parce que mes comportements n’étaient supposément pas aussi «évidents». Mais c’était PAREIL.

Si Jésus venait sonner chez moi, je ferais tout pour l’impressionner avec mes (pas super bons) talents de cuisinière et de (pas super efficace) ménagère. J’aurais du mal à rester assise à la table pour l’écouter, parce que je voudrais qu’il me trouve ben bonne et ben efficace.

Et j’ai commencé à allumer…

C’est à travers le fait de devenir maman que Dieu a permis que je commence à comprendre. Ça été un work in progress, mais il y a quand même eu un point tournant, cet été. J’étais épuisée par un retour au travail un peu trop intense, et je n’avais plus aucune force pour juste profiter de mes journées de congé avec Mimi. Je me souviens d’une journée particulièrement difficile. Mimi criait sans arrêt, d’un cri strident qui fait saigner les tympans. J’avoue, j’avais juste envie de lui répondre en hurlant encore plus fort qu’elle. Je me suis effondrée en larmes en me demandant comment j’allais y arriver, et qui j’allais devenir, si je ne parvenais plus à atteindre mes standards de performance nulle part. Pas assez d’énergie pour être bonne à mon goût au travail, clairement pas assez de patience et de maitrise de soi pour être la maman douce et aimante dont Mimi a besoin, partie la joyeuse épouse que Jean-Math avait connue, et on oublie la vie sociale et les implications à l’église, juste d’y penser, ça me donnait envie de vomir. F-I-N-I-E la superwoman, et ce, je m’en rendais bien compte, pour un bon bout de temps. Pu d’jus, pu d’batterie, pu capab.

Et c’est là que j’ai commencé à allumer pour de vrai. C’est une grâce incroyable d’ailleurs, parce que j’aurais pu rester comme ça encore très longtemps. C’est ça que j’aurais mérité. Mais mon Papa céleste plein de douceur et d’amour m’a expliqué que toutes ces choses n’avaient pas d’importance à ses yeux. Qu’Il n’en avait rien à faire de mes performances, mesurées à échelle humaine. Que bien des choses que j’avais faites par moi-même pour impressionner n’avaient pas de valeur à ses yeux. Moi, j’en avais infiniment, mais pas ce que je tente sans cesse de réaliser pour plaire. J’ai vu ma vie défiler devant mes yeux (ok, ça sonne un peu mélodramatique, j’avoue, mais c’était presque comme ça!), et j’ai compris à quel point tout ce que je faisais, toutes les sphères de ma vie, étaient influencées (que dis-je? EMPOISONNÉES) par mon orgueil. Performance et orgueil, ça va clairement ensemble. Et la Bible dit que Dieu résiste aux orgueilleux (1Pierre 5.5 ; Jacques 4.6). Faque, j’étais un peu dans marde.

Il a commencé à me faire comprendre, pour de vrai, qu’Il était infiniment plus intéressé par ce que je SUIS que par ce que je FAIS. À ce que je le recherche LUI, simplement, au quotidien, plutôt que de fixer mes yeux sur la réussite et la visibilité.

Que ce qu’Il aimait le plus, ce n’était pas que je sois la meilleure au travail, la plus impliquée à l’église ou la personne la plus engagée dans quinze projets à la fois, mais que je m’applique, plutôt, à développer le fruit de l’Esprit, en passant du temps dans Sa présence: l’amour, la joie, la paix, la patience, la bienveillance, la fidélité, la douceur, et la maitrise de soi, par exemple (Galates 5.22). Ces choses sont produites à l’intérieur du coeur, non pas en forçant ou en performant quoi que ce soit (ce serait impossible, de toute façon), mais en cherchant Dieu, Sa Parole, et à être renouvelée et transformée par Lui, encore et encore. C’était à ça, d’abord et avant toute chose, que je devais consacrer mon temps, car c’est véritablement, «la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait» (Romains 12.2)

Quel choc. Toutes ces vérités que je connaissais avec ma tête mais pas avec mon coeur ont commencé à prendre racine au fin fond de moi, et m’ont soudainement fait réaliser que beaucoup de choses dans ma vie étaient à réviser, à recommencer. C’est comme si, après un grave accident, je devais réapprendre à marcher. Ou comme si les fondations de ma maison craquaient de partout et devaient être complètement refaites.

J’ai vu que la route qu’on venait d’entamer, Lui et moi, serait longue et pas toujours drôle, mais en même temps glorieuse parce qu’offrant tellement de nouvelles possibilités. Débarrassée de mon orgueil, et comprenant que je devais m’appuyer sur SES forces en suivant SES plans, je deviendrais utilisable pour de vrai. Et je vivrais, enfin une véritable, réelle, tangible… LIBERTÉ.

 

*Cet article est le premier d’une série de deux articles sur le sujet de la performance. La suite sera publiée très bientôt. Continuez de nous suivre sur http://mamanchrétienne.com.

Écrit par Pricile De Lacroix

Je suis la maman de la pétillante Noémie, cinq ans, et de la douce Léanne, trois ans. Mais avant elles, il y a eu une courte carrière de journaliste, un bac + maîtrise en histoire de l’art, des voyages et de folles aventures, dont la plus grande a été, il y a sept ans, le mariage avec mon incroyable amoureux Jean-Mathieu qui est pasteur principal à l'église de Saint-Honoré en Beauce. Je gère, en plus du joyeux chaos familial, une chouette entreprise en santé naturelle.

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Beaucoup de femmes que je connais considèrent que le plus grand appel de leur vie est d’être mère et que de se donner à 110 % comme maman est le meilleur moyen d’honorer Dieu. J’ai entendu ces phrases encore dernièrement : « Ton plus grand ministère, c’est tes enfants! » et « Une mère devrait être à la maison avec ses enfants au moins jusqu’à ce qu’ils entrent à l’école! ». Ces affirmations sont sans doute assez vraies et sûrement bien intentionnées. Mais, chaque fois que j’entends de telles choses, je ressens un léger malaise, un petit je-ne-sais-quoi qui me chicote et sur lequel je n’arrive pas à mettre le doigt.

Commentaires

1 Commentaire

  1. Marie-Ève

    Je dois t’avouer que ton article me parle beaucoup et me fait énormément réfléchir… Je suis nouvellement maman aussi, d’un petit trésor de 9 mois, et je n’ai pas encore vraiment diminué mon rythme de vie. Avant de me marier, je travaillais toujours 2-3 des fois 4 emplois en même temps. Je juge facilement les gens qui ne « font pas grand chose » et je me valorise beaucoup dans ce que j’arrive à faire, comme si ça me donnait de la valeur.
    Le fait d’avoir un enfant m’amène à relativiser les choses, m’apprend à prendre davantage mon temps et à profiter des choses simples de la vie, mais en même temps, je vois combien mon orgueil prend encore énormément de place. Je veux être partout en même temps et tout faire par moi-même.
    Merci pour ce partage, ça me touche beaucoup et je vois combien je dois mettre cette lutte dans mon coeur au pied de la croix.

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